Bordeaux Aquitaine Marine
Biographies D
Desse - Du Bouzet - Du Bourdieu - Ducasse - Ducos
DESSE, Pierre
- (Pauillac, 31-8-1765 - Lormont, 28-6-1839)
-
extrait
du
livre
de
Léonce
de
LAMOTHE
:
"Notes
pour
servir
à
la
biographie
des
hommes
utiles
ou
célèbres
de
la
ville
de
Bordeaux
– Amsterdam, 1873".
Marin
au
service
de
l'État;
enseigne,
puis
lieutenant
de
vaisseau;
délégué
par
la
République
française
au
Sénégal
pour
pacifier
la
colonie,
revient
chargé
de
dons
patriotiques;
mis
en
jugement
à
son
retour
à
Bordeaux,
et
bientôt
après
libéré
et
félicité
par
les
autorités,
qui
déclarent
qu'il
a
mérité
l'accolade
fraternelle.
Bientôt
après,
chargé
du
commandement
d'une
frégate,
il
tombe
au
pouvoir des Anglais.
Vers
les
premières
années
de
l'Empire,
commande
le
corsaire
de
Bordeaux,
l'Incroyable;
prisonnier
une
deuxième
fois
sur
parole,
en
Angleterre;
peu
après
mis
en
liberté
pour
avoir
sauvé,
dans
une
inondation,
une
femme
que
les
flots
allaient
engloutir.
Il
était
dans
la
marine
marchande
et
se
trouvait
aux
États-Unis,
lorsque
éclata
la
guerre
de
l'Indépendance,
dans
laquelle
il
servit
sous
Lafayette. Rentré en France en 1818, il fait de nouveaux voyages pour le commerce.
En
juillet
1822,
faisant
la
traversée
de
Bordeaux
à
l'île
Bourbon,
va
au
secours
du
navire
le
Columbus,
dans
un
état
de
détresse
extrême,
et
parvient,
malgré
la
violence
de
la
tempête,
après
six
jours
d'intrépides
efforts,
et
au
péril
du
brick
la
Julia
qu'il
commandait,
à
transborder
l'équipage
du
Columbus
et
un
corps
de
troupes
des
Pays-Bas
qui
était
sur
ce
navire.
Rentré
ensuite
au
service
de
l'Etat,
il
reçut
le
commandement
de
la
corvette
la
Truite,
puis
de
la
corvette
la
Robuste,
jusqu'à
la
prise
d'Alger;
nommé
ensuite
par
l'amiral
Duperré,
en
1830,
lieutenant
de
port
de
première
classe
à
Bordeaux,
fonctions
qu'il
a
remplies
jusqu'à
sa
mort; il avait navigué pendant cinquante ans sans avoir jamais fait naufrage.
Cette
longue
et
méritoire
carrière
suffirait
sans
doute
pour
faire
donner
ici
à
Pierre
Desse
une
place
d'honneur;
mais
le
sauvetage
du
navire
hollandais
le
Columbus
a
rendu
son
nom
célèbre
dans
les
annales
de
la
marine;
les
journaux
de
l'époque
donnèrent,
en
effet,
un
grand
retentissement
à
cette
action
héroïque.
Le
capitaine
du
Columbus
et
le
commandant
du
détachement
hollandais
qui
était
à
son
bord,
lui
exprimèrent
publiquement
leur
reconnaissance
dans
une
lettre
du
22
août
1822:
«
C'est
ainsi
qu'arrêté
pendant
six
jours
au
milieu
de
dangers
affreux,
dont
la
seule
générosité
lui
défendait
de
sortir,
méprisant
ses
intérêts
les
plus
chers,
le
soin
de
sa
propre
conservation,
le
capitaine
Desse
parvient
à
arracher
à
la
mort
quatre-vingt-onze
hommes,
qui
n'étaient
point ses amis, qui n'étaient pas ses compatriotes ».
«
Interprète
des
sentiments
de
mon
équipage
et
de
mes
passagers,
comme
M.
Gerlings
l'est
des
troupes
qui
l'accompagnaient,
nous
vous
prions,
monsieur
le
rédacteur,
d'inscrire
dans
la
gazette
dont
vous
êtes
éditeur,
la
relation
de
nos
malheurs,
comme
l'expression du sentiment profond de notre reconnaissance pour le brave capitaine de la Julia ».
Puisse
le
nom
de
ce
héros
de
l'humanité
se
graver
dans
la
mémoire
de
ceux
qui
liront
cette
lettre
aussi
profondément
qu'il
l'est
dans
nos
cœurs!
Puisse
ce
nom,
bientôt
exposé
à
l'admiration
de
la
France
et
de
la
Hollande,
rappeler
à
tous
l'honneur
et
le
modèle
des
marins
de
toutes
les
nations.
»
22
août
1822.
—
J.
Greveling,
capitaine
du
Columbus;
Gerlings,
lieutenant,
commandant
le
détachement
à
bord
du
Columbus.
»
Desse
reçut
les
décorations
française
et
hollandaise
;
le
ministre
de
la
marine
commanda
au
peintre
Théodore
Gudin
une
toile
représentant
les
deux
navires,
la
Julia
et
le
Columbus,
et
ce
tableau,
donné
par
le
gouvernement
à
la
ville
de
Bordeaux,
orne
aujourd'hui
son
Musée
public.
La
Chambre
de
commerce
de
cette
ville
fit
frapper
à
la
Monnaie de Paris une médaille en or, grand module, qui porte l'inscription
suivante:
LA
CHAMBRE
DE
COMMERCE
DE
BORDEAUX
A
PIERRE
DESSE, CAPITAINE DU BRICK FRANÇAIS LA JULIA.
LE
CAPITAINE
ET
L'ÉQUIPAGE
DE
LA
JULIA,
AUX
RISQUES
DE
LEUR
VIE,
ONT
SAUVÉ
QUATRE-VINGT-
ONZE
PERSONNES
PRÈS
DE
PÉRIR,
SUR
LE
NAVIRE
HOLLANDAIS
LE COLOMBUS
, LE 13 JUILLET 1822.
Le Columbus secouru par la Julia (peinture de Théodore Gudin- Musée des Beaux-Arts de Bordeaux - DR)
DU BOURDIEU (Bernard)
— (extrait de P. Levot & A. Doneaud - Les gloires maritimes de la France –Arthus Bertrand,Paris, 1866).
Capitaine
de
vaisseau,
né
à
Bayonne,
le
28
avril
1773,
débuta
dans
la
marine
du
commerce,
à
l'âge
de
16
ans,
puis
passa
au
service
de
l'état
comme
timonier,
en
1792,
et
obtint,
quatre
ans
après,
le
grade
d'enseigne,
en
récompense
d'un
hardi
coup
de
main
qui
valut
à
la
France
la
prise
d'un
bâtiment
anglais
dans
la
rade
de
Gibraltar.
Blessé
et
fait
prisonnier,
l'année
suivante
(1797),
dans
le
combat
de
la
corvette
la
Gaieté
contre
la
frégate
anglaise
l'Aréthuse,
il
fut,
à
son
retour
d'Angleterre,
en
1799,
embarqué
sur
la
Régénérée,
faisant
partie
de
l'armée
navale
d'Egypte.
Après
avoir
rempli
dans
le
pays
plusieurs
missions
périlleuses,
il
fut
expédié
pour la France, et capturé une seconde fois sur l'aviso l'Écrevisse qu'il commandait.
Nommé,
en
1802,
au
commandement
de
la
Coureuse,
il
eut
à
soutenir
plusieurs
engagements
contre
les
Anglais.
Le
plus
sérieux
fut
celui
où,
avec
ses
40
hommes
d'équipage
et
ses
4
canons,
il
coula
à
fond,
sur
la
rade
de
Saint-Pierre
(Martinique),
dans
la
nuit
du
4
au
5
mars
1804,
deux
des
trois
péniches
anglaises
envoyées
contre
lui.
Au
mois
de
janvier
1808,
la
frégate
la
Pénélope
qu'il
commandait
s'empara,
de
concert
avec
la
Thémis,
de
13
bâtiments
anglais.
Capitaine
de
vaisseau,
en
1808,
il
combattit,
le
28
février
1809,
la
frégate
anglaise
la
Proserpine,
dont
il
s'empara,
avec
l'aide
de
la
Pauline,
après
un
combat
d'une
demi-heure.
Choisi,
en
1810,
pour
commander
dans
le
golfe
de
Venise
une
division
de
frégates
françaises
et
italiennes
chargée
de
protéger
la
côte
contre
les
croiseurs
anglais,
il
détruisit,
au
mois
d'octobre,
les
établissements
anglais
de
Lissa
;
mais
quand,
l'année
suivante,
sur
l'ordre
du
prince
Eugène,
il
tenta
de
prendre
cette
île,
il
fut
repoussé
(13
mars
1811),
par
4
frégates
anglaises,
et
tomba
mortellement,
atteint
à
la
poitrine,
d'un
biscayen
(1),
au
moment
où
son
équipage
allait
exécuter
l'ordre
d'aborder
la
frégate
amirale ennemie.
(1) Biscayen : petit boulet de fer battu ou coulé pouvant atteindre une livre, utilisé dans le tir à la mitraille.
DU BOUZET (Eugène)
- (extrait de la Revue d'Aquitaine, T 12).
Le
contre-amiral
du
Bouzet
était
un
des
survivants
du
dernier
voyage
de
Dumont-d'Urville
au
pôle
Sud.
Sa
carrière
a
été
celle
d'un
navigateur
ayant
la
passion
des
grands
voyages
et
de
l'étude
des
pays
lointains.
Élève
de
l'école
navale
d'Angoulême,
il
rentrait
en
France
à
vingt
ans
avec
le
grade
d'enseigne,
et
après
quatre
ans
de
mer
et
un
voyage
autour
du
monde
sous
les
ordres
de
M.
de
Bougainville.
Dans
l'expédition
d'Urville,
il
fut
choisi
comme
second
sur
la
Zélée.
Son
habileté
et
sa
constance
dans
ce
long
et
dangereux
voyage
avaient
été
tellement
appréciées
par
M.
d'Urville,
que
ce
grand
navigateur
voulait
se
le
donner
comme
successeur dans ses voyages de découvertes, et qu'il travaillait dans ce but lorsque la mort le frappa.
Depuis
lors,
sauf
une
campagne
dans
le
Levant,
sous
les
ordres
de
l'amiral
Romain-Desfossés,
et
son
dernier
commandement
au
Brésil,
la
vie
de
M.
du
Bouzet
se
passe
dans
la
mer
du
Sud,
dont
il
avait
fait
en
quelque
sorte
son
domaine.
Citons,
entre
autres,
sa
belle
campagne
sur
la
Brillante,
où
il
rendit
de
nombreux
services
au
commerce
et
prêta
à
nos
missions
en
Océanie
un
appui
que
le
Souverain
Pontife
reconnut
en
le
nommant
commandeur
de
l'ordre
de
Saint-Grégoire.
Citons
encore
son
commandement
de
la
division
navale
et
son
gouvernement
des
établissements
français
en
Océanie.
Dans
ces
colonies,
si
éloignées
les
unes
des
autres,
il
eut
besoin
de
toute
son
activité
et
fit
connaître
son
talent
d'administrateur.
C'est
lui
qui
a
fondé
le
premier
établissement
permanent
dans
la
Nouvelle-Calédonie,
et
qui
a
le
plus
contribué
à
signaler
au
gouvernement
l'importance
de
cette
colonie.
Ce
fut
sur
un
des
récifs
de
cette
île
que
se
perdit
l'Aventure,
qui
portait
son
guidon.
Le
sang-froid
qu'il
montra
dans
cette
circonstance
fut
récompensé par un acquittement à l'unanimité, et bientôt après par le grade de contre-amiral.
Lorsque
M.
du
Bouzet
reçut
le
commandement
de
la
division
navale
du
Brésil
et
de
la
Plata,
les
fatigues
de
la
mer
avaient
déjà
altéré
sa
constitution.
Les
besoins
du
service
ayant
fait
prolonger
d'une
année
son
commandement,
il
ne
voulut
pas
solliciter
son
rappel,
et,
suppléant
à
la
force
par
la
volonté,
il
avança
la
fin
de
sa
vie
pour
remplir
jusqu'au
bout
son
devoir.
Il
revint
en
France
en
1863,
frappé
d'une
maladie
progressive
et
incurable.
Il
perdit
peu
à
peu
le
mouvement
et
presque
la
parole.
Prisonnier
dans
son
propre
corps,
il
ne
lui
restait
que
l'intelligence
et
la
volonté,
avec
une
douceur
inaltérable
dans
la
souffrance
et
en
face
de
la
mort
qu'il voyait venir.
L'Empereur l'avait nommé grand officier de la Légion d'honneur.
Il
avait
la
passion
du
devoir,
la
passion
des
voyages
et
de
l'étude.
Il
savait
toutes
les
langues
de
l'Europe,
l'arabe
et
le
grec
moderne.
A
l'étude
constante
de
son
art
de
marin,
il
joignait
des
connaissances
approfondies
sur
le
droit
des
gens,
l'histoire,
le
commerce,
les
questions
coloniales
et
les
sciences
naturelles.
D'un
sens
droit
et
d'un
esprit
réfléchi,
d'un
caractère
très
ferme
et
conciliant,
c'était
un
homme
complet,
qui
a
rendu
des
services
à
son
pays,
et
qui,
si
sa
carrière
n'eût
été
brisée
par
la
maladie,
aurait pu en rendre de plus grands.
DUCOS, Théodore
(Bordeaux, 22-8-1801 - Paris, 17-3-1805)
Ministre
de
la
marine,
fils
d'un
conseiller
de
préfecture
à
Bordeaux,
et
neveu
du
conventionnel
Roger
Ducos,
ainsi
que
du
baron
Nicolas
Ducos
qui
défendit
si
énergiquement
I.ongwy
en
1815,
naquit
à
Bordeaux,
le
22
août
1801,
fit
son
éducation
au
collège
de
Sorrèze,
et
embrassa
la
carrière
commerciale.
Établi
au
chef-lieu
de
la
Gironde,
il
fut
nommé
plusieurs
fois
juge
au
tribunal
de
commerce
et
membre
de
la
chambre
de
commerce
de
cette
ville.
Un
mémoire
qu'il
rédigea,
au
nom
de
cette
chambre,
sur
la
loi
des douanes, le fit nommer, en 1834, député par ses concitoyens.
Réélu
en
1837,
1839,
1842
et
1846,
il
combattit
à
la
Chambre
les
lois,
dites
de
septembre,
contre
la
presse
périodique,
la
loi
de
disjonction,
les
taxes
exagérées
qui
frappaient
les
fers
et
la
production
vinicole,
réclama
l'amélioration
du
lit
de
la
Garonne,
la
construction
du
chemin
de
fer
de
la
Teste,
vota
pour
l'incompatibilité
entre
les
fonctions
publiques
et
le
mandat
de
député,
pour
l'adjonction
des
capacités
à
la
liste
électorale,
contre
la
dotation
du
duc
de
Nemours,
les
fortifications
de
Paris,
les
réductions
du
budget de la marine, et fit de remarquables rapports sur la pèche de la morue et sur la police du roulage.
Après
la
révolution
de
1848,
il
fil
encore
partie
de
l'Assemblée
constituante,
où
il
demanda
la
dissolution
des
ateliers
nationaux,
et
rédigea
un
rapport
sévère
sur
les
comptes
du
gouvernement
provisoire.
Non
réélu
aux
élections
de
1849
pour
la
Législative,
il
réussit
aux
élections
complémentaires
dans
le
département
de
la
Seine,
la
même
année,
et
fut
nommé
une
première
fois
ministre
de
la
marine,
en
1851,
en
remplacement
de
l'amiral
Romain-Desfossés.
Mais
il
ne
conserva
ce
poste
que
quinze
jours,
s'étant
retiré,
avec
tout
le
cabinet,
devant
un
vote
de
défiance
de
l'Assemblée
nationale,
lors
de
la
destitution
du
général
Ghangainier.
Après le 2 décembre, il reprit son portefeuille, qu'il conserva jusqu'à sa mort.
Son
administration
fut
des
plus
actives.
Il
transforma
en
navires
à
vapeur
une
partie
de
la
flotte,
reconstitua
la
police
de
la
navigation
et
de
la
pêche
côtière,
augmenta
le
chiffre
de
l'inscription
maritime,
et
régularisa
l'administration.
On
lui
doit
aussi
de
grandes
améliorations
dans
l'administration
centrale,
dans
le
conseil
d'amirauté,
dans
l'organisation
de
l'infanterie
de
marine
et
du
commissariat,
dans
le
service
de
santé,
dans
l'institution
des
aumôniers
de
la
flotte,
dans
l'organisation
des
matelots
canonniers et du génie maritime, enfin dans le système de surveillance des fournitures de bois et de vivres.
C'est
encore
sous
son
ministère
que
fut
décidée
la
translation
des
bagnes
de
Rochefort
et
de
Brest
à
Cayenne
;
que
le
contre-
amiral
Febvrier-Despointes
prit
possession
de
la
Nouvelle-Calédonie,
et
que
le
colonel
Faidherbe
commença
à
étendre
le
territoire
et
l'influence
de
la
France
au
Sénégal.
La
guerre
d'Orient
était
venue
donner
un
nouvel
élément
à
l'activité
de
Ducos,
quand
il
fut
brusquement emporté, à Paris, le 17 mars 18o5, par une maladie, résultat de ses excès de travail.